Le boom de l’héritage et ses conséquences sur votre patrimoine

Il existe principalement deux voies pour accéder à la richesse : par ses propres compétences et efforts, ou en héritant d’un patrimoine. Au XIXᵉ siècle, cette dualité était une préoccupation majeure pour les jeunes ambitieux, souvent illustrée dans les œuvres de Balzac ou de Stendhal. Cependant, depuis le début du XXᵉ siècle, la perception a évolué en faveur de la richesse acquise par le travail. Le capital humain et l’effort personnel sont devenus les vecteurs privilégiés pour atteindre le bien-être matériel, surtout lorsqu’ils sont associés à une stratégie d’épargne et d’investissement. Implicitement, la société a adopté l’idée que la croissance économique a favorisé la méritocratie au détriment de l’héritage.

Néanmoins, ces dernières années, l’héritage connaît un retour en force. Cette résurgence a des répercussions notables sur l’élargissement des écarts entre les plus riches et les autres, influence les choix matrimoniaux des célibataires et impacte le domaine de l’investissement. Analysons ces évolutions.

L’ascension des héritiers

Qu’est-ce que l’héritageocratie ?

Ce néologisme décrit une société où la transmission du patrimoine par héritage joue un rôle prépondérant dans la distribution des richesses et des opportunités. En d’autres termes, une économie devient une héritageocratie lorsque les segments les plus aisés de la population le sont principalement grâce aux héritages, plutôt qu’à la création de valeur issue de leurs propres initiatives, efforts et mérites individuels.

Quelques données chiffrées

Durant le XXᵉ siècle, la part des héritages dans les économies développées a diminué, passant de 20 % du Produit National Brut (PNB) dans certains pays à environ 10 %. Cependant, récemment, cette proportion a fortement augmenté. D’après The Economist, cette année seulement, les habitants des pays développés hériteront d’environ six mille milliards de dollars. En Allemagne, le ratio héritages sur production nationale a triplé depuis 1970, et en Italie, les héritages représentent plus de 15 % du PNB.

L’importance croissante des héritages en France

En France, la signification de l’héritage a fluctué au fil des siècles. Entre 1820 et 1910, les héritages représentaient environ 20 à 25 % du revenu national. Ce chiffre est tombé à moins de 5 % en 1950 avant de remonter à environ 15 % en 2010, avec une projection atteignant à nouveau 20 à 25 % d’ici 2050, selon les calculs de l’économiste Thomas Piketty.

Pourquoi les héritages augmentent-ils ?

La hausse des héritages reflète l’accumulation de richesse, des changements démographiques et un ralentissement de la croissance économique.

L’accumulation de richesse

Après la Seconde Guerre mondiale, la reconstruction s’est accompagnée d’une inflation élevée et de taxes successorales importantes. Depuis, l’inflation a été maîtrisée, les impôts sur les successions ont largement diminué (la France faisant exception dans ce domaine) et la valeur de l’immobilier a considérablement augmenté, notamment dans les grandes villes françaises. De plus, la hausse des valorisations boursières a contribué à la création de richesse. Ainsi, une augmentation de la richesse entraîne mécaniquement une augmentation des patrimoines transmis d’une génération à l’autre.

Les évolutions démographiques

Les baby-boomers, nés entre 1946 et 1964, ont atteint l’âge adulte au moment opportun, profitant de la flambée des prix immobiliers et des valorisations boursières. En Allemagne, les plus de 65 ans représentent 20 % de la population mais détiennent un tiers de la richesse. Aux États-Unis, ces baby-boomers constituent également 20 % de la population et possèdent la moitié de la richesse nationale, soit environ 82 trillions de dollars. Cette génération commence à disparaître, léguant des patrimoines substantiels à leurs héritiers, qui sont moins nombreux en raison de la diminution de la taille des familles. Ainsi, un héritage donné est réparti entre un nombre réduit d’héritiers. Selon The Economist, la baisse du taux de natalité au Royaume-Uni a conduit à une augmentation de 24 % du montant moyen légué aux héritiers, soit une hausse moyenne de 60 000 livres sterling en quelques décennies. De plus, l’augmentation de l’espérance de vie prolonge la période d’accumulation du patrimoine avant sa transmission, augmentant ainsi sa valeur.

Une croissance économique modérée favorise l’héritage

En 2014, une étude de l’économiste Thomas Piketty a souligné que les pays à faible croissance économique accumulent davantage de richesse par rapport au revenu national. Les individus épargnent régulièrement, mais dans un contexte de croissance modérée du PNB. Si le rendement des investissements dépasse le taux de croissance économique, l’accumulation de richesses s’accélère plus rapidement que l’augmentation du PNB. C’est le cas de nombreuses économies modernes, dont la France.

Conséquences de l’essor de l’héritageocratie

En France, les revenus du 1 % des héritiers les plus riches dépassent à nouveau ceux du 1 % des salariés les mieux rémunérés. Les implications économiques et sociales de ce retour en force de l’héritage sont multiples.

Renforcement des inégalités sociales

Les grandes fortunes se transmettent presque intactes au fil des générations, accentuant le fossé entre riches et pauvres. Aux États-Unis, les chercheurs Hero Ashman et Seth Neumuller estiment que les héritages expliquent un quart des écarts de richesse entre les Américains blancs et noirs. De même, l’augmentation des héritages accentue les inégalités sur le marché immobilier, que la transmission de la richesse se fasse au décès ou de manière anticipée.

L’impact sur les relations personnelles

L’augmentation de la richesse transmise influence également la manière dont les individus choisissent leurs partenaires. Selon une étude britannique relayée par The Economist, les héritiers ont davantage tendance à se mettre en couple avec d’autres personnes bénéficiant elles aussi d’un patrimoine hérité. Cette homogamie patrimoniale tend à verrouiller l’ascension sociale en renforçant les écarts déjà existants. Le mariage devient, pour certains, un moyen de préserver et consolider les fortunes familiales, plutôt qu’un espace de mixité sociale.

Une réorientation des comportements d’investissement

Enfin, l’afflux d’héritages modifie aussi le comportement des investisseurs. Les personnes qui reçoivent un patrimoine important sont souvent plus enclines à adopter une posture prudente, privilégiant les actifs stables et peu risqués. Plutôt que de rechercher des rendements élevés par l’innovation ou l’entrepreneuriat, les héritiers favorisent des placements qui assurent la préservation de leur capital. Cette tendance peut freiner le dynamisme économique à long terme, car une part croissante du patrimoine est ainsi mise à l’abri du risque, au détriment du financement de l’économie réelle.

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Bruno

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par Edouard BinET

Expert en Gestion de Patrimoine depuis plus de 15 ans, Edouard Binet accompagne les particuliers ainsi que des chefs d’entreprises sur tous les sujets patrimoniaux : épargne, retraite, immobilier, réduction d’impôts, transmission, conseil patrimonial, prévoyance entre autres.

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